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Parole de mentors
Sep 21, 2022

Levée de fonds : conseils pour vous rendre visible auprès des investisseurs

Nous sommes fiers de compter Adrien Chaltiel parmi nos experts pour notre parcours « Levée de fonds » BeeMyDesk.

Adrien a tout d’un entrepreneur : fondateur de plusieurs sociétés depuis près de 10 ans, il est aujourd’hui co-fondateur d’Eldorado. Depuis plus de 4 ans, cette plateforme met en relation les start-ups avec les investisseurs privés et les fonds publics.

Vous participez en tant qu'expert au parcours « Levée de fonds » BeeMyDesk. Qu’en  pensez-vous ?

Je trouve ce parcours très complet et très adapté aux problématiques des entrepreneurs, à savoir, de leur proposer un parcours très personnalisé, puisqu’il y a autant de stratégies de levées de fonds et de stratégies de financement que de typologies d’entrepreneurs. Difficile, donc, pour les structures d’accompagnement d’avoir un discours global. Chez Eldorado et dans le livre que nous avons écrit, nous essayons d’être le plus généraliste possible. Mais dans la pratique, le meilleur accompagnement est celui qui s’adapte à chaque projet et chaque typologie de projet. Il y a tellement de paramètres qui dépendent du secteur d’activité, du montant recherché, de l’historique des équipes fondatrices… que toutes les situations sont « intuitu personae » et il faut donc s’adapter à chaque personne. Or le parcours BeeMyDesk est très pertinent pour répondre à ces adaptations.

Pour ma part, j’interviens de manière globale dans ce parcours pour présenter toutes les stratégies de financement et j’accompagne ensuite les différents porteurs de projet sous forme de coaching individuel. Je leur explique que, selon le montant qu’ils cherchent et leur typologie de projet, dans leur cas, il faut d’abord passer par tel ou tel dispositif - bancaire, public, levée de fonds.  

J’aime également évoquer tous les éléments complémentaires aux levées de fonds : financement public, non dilutif, en somme, tous les financements alternatifs. En effet, il ne faut pas résumer la levée de fonds aux investisseurs qui financent. La levée de fonds concerne également les relations dans la gouvernance de l’entreprise. C’est aussi pour cette raison que je trouve le parcours Levée de fonds BeeMyDesk très adapté et très complet pour les entrepreneurs.

Quels signes montrent que l’on ne devrait pas s'associer avec certains investisseurs ?

Il faut se comporter comme lorsque vous cherchez un co-fondateur ou une co-fondatrice. La première chose à faire est de vérifier l’alignement des intérêts, à savoir, pourquoi voulez-vous vous associer ensemble, quelles sont les attentes des uns et des autres et les intérêts que vous avez. Voulez-vous créer une entreprise qui va devenir une licorne ou un business qui va devenir traditionnel et rentable ? Votre vision est-elle la même ? Votre manière de travailler, votre manière de voir les choses, même au-delà du business, les valeurs sur lesquelles vous vous retrouvez convergent-elles ? Pour éviter les erreurs, il faut donc vérifier tous ces éléments et cet alignement des intérêts.

Cela signifie qu’il ne faut pas dire oui vite, mais vous laisser le temps, temporiser pour réfléchir, malgré la pression de l’investisseur. Mieux vaut ne pas faire un deal que de faire un mauvais deal parce que lever des fonds ne signifie pas uniquement lever de l’argent mais réaliser un vrai parcours d’entreprise. Or tout l’ADN de l’entreprise va évoluer après cette levée de fonds, même si les investisseurs restent très peu actifs voire ont un pouvoir assez faible dans la gouvernance.

Il faut également se renseigner sur les investisseurs, ce qui implique de poser des questions à d’autres entreprises, d’autres start-ups, d’autres personnes qui les connaissent dans l’écosystème. Cette prise de référence avec des questions très claires est très importante : demandez-leur comment cela se passe avec tel investisseur, que s’est-il passé quand ils ont connu des difficultés avec cet investisseur ? Vous vous assurerez ainsi que ce seront des personnes solidaires, dans les bonnes comme dans les mauvaises nouvelles. Cela rejoint d’ailleurs ce que j’affirmais précédemment : il ne faut pas donner de réponse trop vite et prendre le temps de poser des questions aux investisseurs. La première des questions à poser est : pourquoi voulez-vous investir dans mon entreprise, quelle ambition voyez-vous dans cet investissement ?

J’ajouterais également un dernier point concernant l’alignement des intérêts. Sachez que les investisseurs n’ont pas forcément exactement les mêmes intérêts que vous.

En effet, investir dans une entreprise, ce n’est pas seulement participer à la croissance, c’est également faire une plus-value, faire un rachat. Quand ils investissent dans une entreprise, les investisseurs suivent un business model. C’est un peu moins vrai pour les business angels, mais les fonds d’investissement, eux, n’aspirent qu’à une chose : revendre l’entreprise. Il faut donc l’avoir en tête et plus vite vous le savez, mieux c’est, cela vous évite de vous retrouver dans des situations de blocage et d’empêcher des deals.

En résumé, pour décider de vous associer à un investisseur, aucun doute ne doit subsister. Si vous vous demandez, par exemple, pourquoi un investisseur voudrait participer à toutes les décisions, prenez le temps de trouver la réponse. La gouvernance doit être moins élevée quand on est investisseur. Il faut donc vraiment considérer l’investisseur comme une personne qui va aider votre entreprise, participer en tant qu’associé, mais qui ne sera pas impliquée sur toutes les décisions (décisions qui dépendant du montant recherché, du stade de développement, des besoins de financement, de compétences, de conseils, de contacts, autres que financement). Posez des questions aux investisseurs et demandez-leur, s’il fallait ré investir, le referaient-ils ? Assurez-vous également qu’ils comprennent bien votre activité et votre business model. S’ils ne comprennent pas l’acquisition ou le modèle économique, de cette incompréhension peuvent naitre des frustrations et ces frustrations peuvent engendrer des situations compliquées.

Prenez donc vraiment le temps de partager votre expérience sur le business et sur le secteur d’activité et analysez s’il y un intérêt commun à faire développer votre entreprise. Chacun doit être dans son rôle. Des signaux d’alerte peuvent se manifester, lorsque par exemple un investisseur veut participer à toutes les décisions ou veut modifier le produit. Fiez-vous à votre intuition : si vous voyez que des éléments ne vous semblent pas cohérents, n’hésitez pas à dire non à un deal.

J’aime utiliser une métaphore en ce qui concerne le champ d’intervention de l’investisseur, avec la voiture. Un investisseur est censé mettre de l’essence dans la voiture, pour qu’elle aille le plus loin possible. Certains investisseurs vont vouloir se mettre dans le coffre et vont vous demander de les appeler quand vous êtes arrivés. D’autres vont se mettre sur le siège passager, vont commencer à toucher au GPS, à choisir la musique et même à toucher le volant.

L’interventionnisme d’un investisseur peut être très large et souvent, les entrepreneurs ne l’ont pas forcément en tête quand ils cherchent un investisseur. Le pack d’actionnaire peut contenir 1 ou 10 millions d’euros, cela aura une saveur tout à fait différente avec deux pactes différents. Certains investisseurs pourront prendre le contrôle de la société ou écarter la direction, plus ou moins facilement. Il faut donc s’en prémunir.

C’est pour cette raison qu’il est essentiel de bien vous entourer et de vous faire conseiller. Faites appel à des cabinets d’avocats, en particulier ceux spécialisés dans le système de l’entrepreneuriat au sens large.

Comment s'organise la répartition du montant d'une levée de fonds (cash-out, montant dédié au développement de l’entreprise...) ?

Avant tout, et il faut d’ailleurs que les entrepreneurs montent en compétence sur ce sujet, il est important de déterminer dans un premier temps les besoins qu’ils ont. Le montant ne se détermine pas par rapport à ce qui se fait sur le marché, ce qui existe ou non, parce que cela peut être piégeux de ne pas lever assez ou de trop lever.

Il faut d’abord partir de ce besoin pour les 2-3 prochaines années en terme de développement. En général, on arrive sur une phase où le produit est mature pour le marché, un marché important. Mais il faut calculer votre besoin et déterminer comment répartir cette levée de fonds : ne pas l’utiliser entièrement en 2 mois, ni tout conserver pendant 3 ans. Cet argent doit être mis au travail, c’est un savant mélange entre les deux.

C’est donc d’abord à vous, entrepreneurs, d’effectuer un travail d’introspection : combien avez-vous d’argent pour atteindre vos prochains objectifs de rentabilité, de croissance, de développement du produit, de la R&D ? La valorisation se fait ensuite en conséquence : il s’agit à peu près des prix du marché sur les 2 ou 3 premiers tours de table. Les entrepreneurs cèdent en général entre 15 et 25% du capital.

Le calcul ne s’effectue pas forcément sur des multiples de rentabilité, de croissance ou de chiffre d’affaires parce qu’il n’y en a généralement quasiment pas. Il faut s’appliquer aux prix du marché et ne pas avoir une valorisation trop élevée car il s’agit d’une négociation. Il y a d’un côté les entrepreneurs qui veulent des investisseurs qui achètent le moins d’actions pour le plus cher possible et de l’autre, les investisseurs, qui veulent le plus d’actions pour le moins cher possible.

Cette négociation se fait au prisme des comparables du marché, sur les deux ou trois premiers tours de table et les 15-25% de votre capital. Si vous cherchez 500 000€ pour un tour de seed, la valorisation sera entre 1,5 et 2,5 millions d'euros.

En ce qui concerne le besoin de financement, j’attire votre attention sur un dernier point de vigilance : il ne faut pas l’apprécier uniquement par rapport au tour d’equity. Pensez qu’il existe des dispositifs d’effet de levier tels que Bpi France, les banques, les régions, les dispositifs de financement non dilutifs, qui font que vous allez lâcher tant de capital, mais que vous pourrez aussi faire le reste avec Bpi ou autres dispositifs publics.

La plupart du temps, la répartition des premiers tours de table est assez commune. En général, la majeure partie des dépenses sert à subvenir à deux besoins :

  • Le recrutement, parce qu’il faut faire une mise à l’échelle et les entrepreneurs vont donc recruter des équivalents temps pleins (CDI, CDD, contrats de professionnalisation, d’alternance, stagiaires) ainsi que les frais administratifs autour des RH (locaux, assurance, mutuelle…).
  • Tout ce qui se rapporte à la R&D, l’innovation et la tech au sens large (environnemental, social, sociétal). Un certain nombre de dépenses sont liées à ce domaine : frais d’agence, d’études de marché, outsourcing du développement d’une technologie… En somme, tous les frais conséquents à la levée de fonds, qui permettent de passer le produit à l’échelle. Quand les tours de table augmentent en fonction de la croissance de la société, il s’agira de frais liés à l’internationalisation ou au « scale » (la réplicabilité) progressive des entreprises dans d’autres secteurs ou domaines d’activité.

Il y a également des frais incompressibles liés à la levée de fonds tels que les frais d’avocats, de leveurs de fonds, de conseils autour de la levée de fonds quand vous faites par exemple appel à un cabinet de crédit d’impôt. De nombreux partenaires et prestataires ont permis à l’écosystème de se renforcer, avec les comptables, avocats, start-ups, leveurs de fonds, cabinets spécialisés… Cet argent permet également de faire travailler des partenaires et prestataires, ce qui explique que la French Tech est en pleine expansion car les leveurs de fonds font tirer tout l’écosystème vers le haut.

Que contient le pacte d’actionnaires ?

Il ne peut pas y avoir un entrepreneur qui lève des fonds sans comprendre et connaitre les clauses majeures d’un pacte d’actionnaires.

Elles s’organisent autour de 3 thématiques principales :

1) L’engagement des entrepreneurs dans leur entreprise 

  • Combien de temps ils vont durer ?
  • Si l’un d’entre eux fait une faute, s’ils veulent se séparer de l’un d’entre eux ou si l’un d’entre eux veut partir, comment cela s’organise-t-il ?
  • S’ils veulent céder des parts entre eux ou à l’extérieur, s’ils veulent à nouveau lever des fonds, comment cela va-t-il s’organiser ?

2) La gouvernance et organisation de la société 

Ce deuxième point concerne le board, le comité.

  • Qui décide de qui intervient et sur quoi ?
  • Quels sont les investisseurs au board pour participer avec les entrepreneurs dans les décisions ?
  • Quelles sont les décisions soumises à la majorité ou non ?

3) Les clauses et événements autour de la liquidité 

Ce troisième point est essentiel en cas de rachats, reventes, ventes de l’entreprise ou difficultés. Dans le cas d’une levée de fonds ou d’un rachat à une valorisation moins élevée que les précédentes levées, il y a des clauses de liquidation préférentielles.

En résumé, le pacte d’actionnaire est comme un contrat de mariage, il va organiser toute la vie de l’entreprise après la levée de fonds et de son organisation en général, après ce « mariage » avec les investisseurs, en cas de succès et d’échec. Quand vous êtes entrepreneur, partie prenante de ce deal, il faut vraiment tout relire et le connaitre sur le bout des doigts, car vous vous retrouvez face à des personnes qui connaissent très bien le sujet.

C’est d’ailleurs un sujet très intéressant que nous avons développé, chez Eldorado, à travers plusieurs articles, notamment sur les clauses du pacte d’actionnaires. Je suis également membre de The Galion project, un site entrepreneurial, qui a édité une term sheet type très complète sur ces aspects.

En général, combien de temps restent les Business Angels au capital ?

C’est une question difficile : si l’entreprise échoue, les business angels restent le temps qu’elle échoue, ce qui arrive tout de même dans 80-90% des cas.

Cela dépend aussi des investisseurs. Certains veulent rester toute la durée de vie de l’entreprise, mais de plus en plus, on observe des cash out partiels : les entrepreneurs peuvent eux-mêmes revendre progressivement, au fur et à mesure des succès de l’entreprise.

Tout au long de la croissance des entreprises, il y aura des tours de table successifs, donc des opportunités de sortir. C’est ce que l’on appelle nettoyer la « Cap Table », la table de capitalisation : les investisseurs nouveaux vont proposer aux premiers investisseurs de revendre leurs actions progressivement à chaque tour de table.

Les investisseurs peuvent donc rester 3-4 ans. Prenons un exemple : l’entreprise a un an, fait un tour de seed, 3 ans plus tard, il y a une grosse série A ou série B et on propose au business angel de sortir à ce moment-là, mais il peut rester toute la durée de vie de l’entreprise. Pour moi, le bon âge, est de 10 ans. En 10 ans, on a fait le tour de son business, on sait s’il y a une opportunité de le revendre. D’ailleurs, la durée de vie des leveurs de fonds se situe autour de 7 ans. Les fonds d’investissement, eux, investissent autour de 3 ans.

La maturité d’un business la plus complète se situe autour de 10 ans. Les investisseurs, les business angels, peuvent donc rester soit jusqu’à la liquidation de la société, qui se fait sur un délai variable, soit pour les 4 à 10 prochaines années avant d’avoir une potentielle sortie ou une revente de leurs actions, sauf en ce qui concerne les reventes intermédiaires (les cash out partiels), qui se démocratisent de plus en plus. 

Comment se rendre visible auprès des investisseurs ?

Je vous conseille d’appliquer ces trois points essentiels :

1) Faites vivre votre marque

Faites parler de vous. Quand vous souhaitez lever des fonds et que vous avez besoin d’investisseurs pour développer votre entreprise, vous ne pouvez pas être discret, caché. Il faut avoir un compte Linkedin complet, créer des contenus sur ce que vous faites, votre domaine d’activité, réaliser des conférences, être visible, surtout qu’au démarrage, c’est complexe d’avoir des clients. Il faut donc avoir des projets et bien communiquer pour être identifié par les investisseurs.

2) Soyez proactif dans le réseau 

Participez à des événements (sans tous les faire), ciblez des événements dans lesquels vous pouvez rencontrer des personnes et sollicitez des réseaux de votre école, votre université, mais aussi de votre ancien travail. D’ailleurs, sans parler de levée de fonds, il faut aussi rencontrer des personnes avant de lever des fonds. En général, les histoires se font avant d’être en recherche de financement parce que vous sollicitez votre réseau pour raconter l’histoire de votre entreprise.

3) Utilisez les plateformes

Je pense bien entendu à Eldorado, que j’ai fondé, mais également à Linkedin et tous les réseaux professionnels où vous pouvez vous faire identifier par des investisseurs assez tôt, pas forcément lorsque vous êtes en levée de fonds, mais en amorce de phase. Cela s’anticipe, il ne faut pas commencer à chercher des investisseurs quand il ne vous reste plus que 2 mois de trésorerie.

Un dernier mot pour conclure ?

Pour conclure, j’insisterais sur 2 conseils majeurs :

  • L’anticipation
  • La connaissance financière : ne pensez pas que la levée de fonds n’est pas faite pour vous, que vous n’avez pas de réseau. La levée de fonds est possible et moins compliquée qu’on ne le pense. Il y a de l’argent dans l’éco système, il est en pleine croissance et il y a de la diversité.

Ne vous mettez pas de barrières quand vous cherchez de l’argent car tout le monde peut lever ! C’est ce message positif que j’aimerais diffuser. Soyez résilient et optimiste !

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